19 avril 2010

Vers une latino américanisation des villes chinoises ?



La récente sortie de l'ouvrage Urban Poverty in China dirigé par Fulong Wu, Chris Webster, Shenjing He et Yuting Liu (Edward Elgar Publishing, 2010) vient relancer le débat sur la "latino américanisation" des villes chinoises qui agite la classe politique chinoise et les spécialistes des villes depuis près d'une dizaine d'année. L'augmentation de la pauvreté urbaine serait la résultante d'un système qui d'une part aurait perdu une grande part sa fonction redistributrice et d'autre part maintiendrait mécaniquement certains groupes dans un état de pauvreté endémique. En Chine, les pauvres urbains représenteraient entre 4 à 8% de la population urbaine totale, soit entre 15 et 31 millions d'individus!

Dans leur ouvrage, qui reprend les résultats d'une importante enquête menée en Chine en 2006-2007 auprès de plus de 1800 foyers répartis dans 25 quartiers pauvres de 6 villes chinoises, les auteurs creusent de façon systématique les causes profondes de cette pauvreté urbaine. Ils révèlent en particulier les effets des réformes transitoires qui, en Chine, ont produit ce qu'ils qualifient de "nouvelle pauvreté urbaine" d'où émergent deux principaux groupes : les laissés-pour-compte de la croissance qui ont perdu leur emploi avec la disparition des entreprises d'Etat et les travailleurs migrants venus des campagnes, les mingong, qui sont maintenus dans un état de précarité à cause du système en cours du hukou.

Il est frappant de constater, à la suite des auteurs de l'étude, que, même si la pauvreté urbaine est reconnue officiellement depuis à peu près 10 ans, les politiques publiques ciblées ne semblent pas être à la hauteur des enjeux : par exemple l'équivalent chinois du revenu minimum d'insertion ne bénéficie finalement qu'à une partie des personnes dans le besoin ou bien encore les programmes de logement social en locatif apparaissent par exemple comme totalement sous-mesurés. Il en résulte des conditions de vie particulièrement sensibles pour de nombreux groupes qui n'ont aujour'd'hui pas accès aux services sociaux : déjà, au début des années 2000, plus de 60% des pauvres urbains n'avaient pas d'assurance maladie.

L'un des apports de l'ouvrage est de montrer que la progression de cette pauvreté endémique est souvent associée à une forme de ségrégation socio-spatiale et la naissance de quartiers où tendent à se concentrer les franges les plus démunis de la société. En effet, la pauvreté se lit de plus en plus dans la cartographie sociale de villes où la notion de mixité sociale semble être dorénavant reléguée à l'histoire...

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